L’impact de la pandémie de COVID-19 sur les propriétaires de marques et un espace de contrefaçon en pleine évolution
La pandémie de COVID-19 a créé une nouvelle normalité et modifié les besoins. Les entreprises d’envergure internationale réorientent leurs chaînes de production pour mieux répondre au besoin croissant d’équipement de protection individuelle (EPI) au Canada. Ces efforts illustrent les valeurs d’intégrité et d’étroite collaboration dans l’intérêt du bien collectif. Cependant, on n’a constaté aucune pénurie d’acteurs en quête d’opportunités de profiter de cette crise. En réponse à cette situation, les services de police, les propriétaires de marques et les praticiens du domaine de la PI doivent concentrer leurs efforts sur le ciblage des activités illicites liées aux criminels qui ont exploité la pandémie comme l’occasion rêvée pour réaliser un profit immédiat et personnel.
Opérations coordonnées
Tout au long du mois de mars 2020, 90 pays ont participé à l’« Opération Pangea XIII » d’INTERPOL, un effort coordonné qui ciblait la vente en ligne illicite de médicament et de produits médicaux. Selon le rapport d’INTERPOL sur cette opération, les autorités participantes ont inspecté plus de 326 000 paquets, en ont saisi plus de 48 000 et lui ont permis de procéder à 121 arrestations. Les marchandises saisies en lien à l’opération Pangea XIII concernaient environ 2 000 bannières publicitaires en ligne sur des dispositifs médicaux liés à la COVID-19 et des « médicaments pour lutter contre le coronavirus ».[i] En plus des produits de contrefaçon et d’EPI non conformes et de qualité inférieure (y compris des masques faciaux et des désinfectants pour les mains), les services chargés de l’application de la loi ont saisi plus de 4 millions de produits pharmaceutiques illicites, en plus de milliers de trousses d’analyse et d’instruments chirurgicaux contrefaits. Les faux masques demeurent les produits les plus affichés en ligne. L’opération Pangea XIII démontre l’étendue à laquelle certaines personnes chercheront à réaliser un profit immédiat en dépit de l’incidence grave et létale de leur activité sur la santé publique. Ces efforts harmonisés et permanents sont essentiels pour lutter contre les réseaux qui travaillent d’arrache-pied à la distribution et la commercialisation de produits contrefaits non conformes et de qualité inférieure, interdits et en grande demande.
Mesures proactives et approche de la société 3M
Les masques contrefaits continuent de représenter une grave menace pour la population. Les Centres de prévention des maladies (CDC) des États-Unis et Santé Canada ont émis d’importantes mises en garde au sujet des respirateurs N95 frauduleux. Le 14 avril 2020, Santé Canada a alerté les Canadiens au sujet des risques liés à l’utilisation de « respirateurs N95 frauduleux et non autorisés, car ils pourraient ne pas protéger les consommateurs contre la COVID-19 ». Santé Canada a demandé aux citoyens de vérifier si leur respirateur N95 a été homologué par le National Institute for Occupational Safety and Health (NIOSH) des États-Unis et de communiquer avec Santé Canada si leur masque est contrefait et non autorisé. Dans un même ordre d’idées, les CDC ont partagé des renseignements détaillés et des conseils concernant les respirateurs frauduleux qui sont faussement commercialisés et vendus comme étant des produits approuvés par le NIOSH. Les CDC continuent d’afficher des produits connus d’EPI contrefaits qui représentent faussement une approbation du NIOSH sur leur site Web dans le but d’alerter le public de façon efficace et efficiente.[ii]
Il est de plus en plus important pour les propriétaires de marques d’agir de façon proactive et de rajuster leurs stratégies de répression de la contrefaçon en fonction de la situation actuelle. Avant la pandémie, on avait déjà remarqué une augmentation croissante du nombre de vendeurs en ligne et les propriétaires de marques étaient confrontés à un afflux de canaux de distribution interdits. Même si les propriétaires de marques doivent absolument enregistrer leur propriété intellectuelle auprès de l’Agence de protection des frontières et des douanes (CBPA) des États-Unis dans les compétences où les marchandises sont vendues, encore plus d’efforts supplémentaires devront être déployés pour protéger la santé et la sécurité des consommateurs en ces temps difficiles.
En outre, le gonflement des prix des fournitures médicales par des vendeurs tiers préoccupe de plus en plus les consommateurs, les gouvernements et les propriétaires de marques pendant cette pandémie. Certaines entreprises ont déterminé que le gonflement des prix mine la valeur de leurs marques. La société 3M Co., productrice de masques N95, a pris des mesures précoces et rapides pour enrayer ce genre de conduite aux États-Unis et au Canada, à l’égard de ses produits. En plus de collaborer étroitement avec les autorités policières nationales et and internationales, 3M a intenté un certain nombre de procès aux États-Unis et un au Canada en invoquant, entre autres motifs, la contrefaçon de marque, la concurrence déloyale, la dilution et l’association trompeuse. Un procès intenté en Ontario ciblait une société qui revendiquait une affiliation avec 3M, en vendant des masques de protection convoités à un prix excessif. Les masques en question étaient vendus en ligne sur la plateforme Shopify à un prix cinq fois plus élevé que le prix de vente suggéré.
L’importance de la santé et la sécurité, ainsi que la demande croissante pour les fournitures médicales et l’équipement de protection individuelle, incitent les propriétaires de marques à adopter une approche proactive. Tel que démontré par les efforts accrus et agressifs de la société 3M, l’objectif pour les propriétaires de marques — surtout pendant cette pandémie — est de prévenir la fraude et l’activité illicite avant leur enclenchement.
Plusieurs mesures peuvent être prises pour protéger le droit d’auteur, les marques de commerce et l’écart d’acquisition des marques. L’engagement accru du consommateur et la notoriété des marques peuvent contribuer à atténuer la menace engendrée par le nombre croissant de publicités fausses et/ou trompeuses. Les consommateurs avertis pourraient être davantage disposés à signaler les publicités factices, les faux médias sociaux et les courriels d’hameçonnage s’ils savaient comment les reconnaître. Les marchés mondiaux en ligne ont réagi rapidement en supprimant les profiteurs de la pandémie de COVID-19; les propriétaires de marques devraient toutefois consacrer plus de temps en ligne à la recherche de vendeurs malhonnêtes qui pourraient récidiver ou s’associer à un réseau illégitime plus important. En plus des avis de retrait immédiat du commerce électronique, des stratégies créatives et assertives devront être mises en place pour poursuivre ceux et celles qui profitent indûment de cette pandémie.
Répression en ligne cruciale
Cette crise a exposé les dangers réels et les risques accrus auxquels les consommateurs sont confrontés lorsqu’ils achètent des marchandises en ligne. La réorientation vers l’achat de produits en ligne était prévisible, suite à l’instauration des mesures de distanciation sociale et de la fermeture des magasins physiques non essentiels. Malheureusement, en plus des nouveaux vendeurs non autorisés qui n’avaient aucun autre choix que de réorienter leurs activités vers le commerce en ligne, l’internet a été submergé de domaines frauduleux et malveillants. Le rapport publié par la société de recherche en cybersécurité Sophos Labs confirme qu’à la fin du mois de mars 2020, plus de 42 000 noms de domaine contenant les mots « COVID » et/ou « corona » ont été enregistrés.[iii]
Les hôtes et les registraires en ligne ne sont pas à l’abri des fraudeurs et des contrefacteurs, mais le besoin immédiat de prévenir et supprimer de façon proactive les domaines et les vendeurs abusifs lies à la pandémie est immense. Depuis le début de la pandémie, sur la plateforme Shopify seulement, des milliers d’utilisateurs ont été supprimés pour avoir enfreint les politiques en ligne, et environ 3 000 abonnements ont été suspendus parce qu’ils ont vendu des masques et des désinfectants pour les mains à des « prix exorbitants ». [iv] En plus des fournitures médicales et des désinfectants, les sites Web qui annoncent de fausses trousses d’analyse du coronavirus et des « remèdes bidons » sont devenus omniprésents. Ces sites sont particulièrement insidieux, car plusieurs d’entre eux ont été créés pour obtenir des renseignements personnels, des données de paiement et des informations de connexion. En plus de profiter des procédures des marchés et des divers réseaux sociaux qui offrent ces activités, les propriétaires de marques devront mettre en place leurs propres procédures pour faciliter la détection rapide et le renforcement efficace de ces mauvais acteurs sophistiqués. Les propriétaires de marques devront constamment consulter les plateformes en ligne les plus populaires et examiner les politiques et les procédures disponibles.
La pandémie de COVID-19 aura des effets à long terme sur le commerce électronique. L’élaboration des escroqueries liées à la pandémie de COVID-19 est inévitable. Pour protéger l’écart d’acquisition d’une marque et pour combattre l’afflux inévitable de contrefacteurs, les propriétaires de marques doivent concentrer leurs efforts sur la mise en œuvre de stratégies personnalisées qui leur permettront de composer avec la crise fluctuante. En ces temps difficiles, les propriétaires de marques doivent absolument revoir leur approche en matière de PI et confirmer que les enregistrements nécessaires de marques de commerce, de droit d’auteur et de dessins industriels sont à jour et déposés auprès des marchés en ligne, de l’ASFC et de tous les autres organismes appropriés qui peuvent contribuer à réduire l’augmentation du nombre de produits dangereux et interdits.
[i] « Une opération mondiale met au jour une augmentation des faux produits médicaux dans le contexte de la COVID-19 », 19 mars 2020, INTERPOL. https://www.interpol.int/fr/Actualites-et-evenements/Actualites/2020/Une-operation-mondiale-met-au-jour-une-augmentation-des-faux-produits-medicaux-dans-le-contexte-de-la-COVID-19
[ii] https://www.cdc.gov/niosh/npptl/usernotices/counterfeitResp.html; https://canadiensensante.gc.ca/recall-alert-rappel-avis/hc-sc/2020/72707a-fra.php
[iii] https://news.sophos.com/en-us/2020/04/14/covidmalware/
[iv] “Profiteers bypassing Facebook, Shopify bans to push marked up masks amid COVID-19 pandemic” March 19, 2020, https://www.theglobeandmail.com/canada/article-profiteers-continue-to-exploit-covid-19-pandemic-to-push-masks/